En 2020, la Fondation Roi Baudouin publiait le premier baromètre de l’inclusion numérique. L’un de ses chapitres portait sur l’accès aux services numériques essentiels: santé, administration, commerce et banque en ligne. La FRB a fait appel aux 2 mêmes chercheuses, Périne Brotcorne et Ilse Mariën, épaulées par Laura Faure pour actualiser ces données dans une nouvelle étude « Inclusion numérique, les services numériques essentiels profitables à toutes les personnes » en attendant en 2022 une deuxième édition de son baromètre.
Plans d’équipements et de soutien numériques
C’est sur ce terrain que la crise du Covid-19 a clairement montré qui est encore et qui n’est plus en mesure de faire appel à des éléments essentiels de la vie sociale, comme l’enseignement, le travail, la santé et les services publics. Depuis, de nombreuses actions ont été prises : mise en place de la Task Force fédérale Groupes vulnérables, renouvellement du parc des EPN, plan d’équipement des écoles, Fonds ING pour une société plus digitale, appels à projet Linking Youth UP de la fondation P&V, PC Solidarity de DigitalForYouth ASBL, Digit All de BNP Paribas Fortis) afin de favoriser l’accès à Internet et d’aider les citoyens à développer leurs compétences numériques. Pour quels résultats?
Les achats et ventes en ligne en forte augmentation
Les trois principaux constats des autrices sont une légère augmentation de l’utilisation des services essentiels en ligne, la stagnation du volet e-administration et le maintien d’importantes inégalités. En 2020, les taux d’appropriation des services bancaires en ligne et le commerce électronique sont de 82% (+3%) pour la banque en ligne (82%) et de 70% pour le commerce électronique (+11%). La forte croissance des achats en ligne est sans nul doute liée aux confinements imposés par la crise sanitaire en 2020. La santé en ligne connaît elle aussi une belle progression, en tout cas en Wallonie (+8%). Il est vrai qu’on part de plus loin, avec une moyenne pour la Belgique de 39%, en croissance de 5%. La consultation des services publics en ligne est elle de 5 %: on passe ainsi de 64 à 68 % pour la Belgique
Education et revenus sont les 2 facteurs les plus déterminants
Sans surprise, les niveaux d’éducation et de revenus constituent les deux facteurs clés déterminant la propension à utiliser les services en lignes: les diplômés de l’enseignement supérieur ont 2 fois plus recours aux services administratifs (83% au lieu de 43%) et à la santé (55 au lieu de 31%) en ligne. Ces rapports sont de 93% au lieu de 64% pour l’e-banking et l’on constate une tendance similaire pour le commerce électronique (90% au lieu de 62%). Pour la banque à domicile, les autrices citent une autre étude, celle de Anrijs, Ponnet et De Marez conduite en Flandre en 2020 auprès des personnes vivant dans la pauvreté. 40% de celles-ci éprouvent des difficultés à réaliser des démarches financières en ligne, contre 20% des personnes ne vivant pas dans un ménage pauvre. De même, 4 personnes pauvres sur 10 peinent à rechercher un emploi en ligne. 30% d’entre elles éprouvent des difficultés à trouver des informations liées aux services et prestations sociales en ligne. Ce dernier chiffre est à ramener à 10% dans le cas de leurs homologues ne vivant pas dans un ménage pauvre. Et si les achats et vente en ligne sont pratiques courantes dans les ménages à revenus élevé (89%), c’est malheureusement mais fort logiquement moins évident pour les personnes à revenus modestes (54%).
Usage light de l’administration en ligne
En Belgique, le recours à internet pour interagir avec les pouvoirs publics consiste principalement à consulter des informations sur des sites des administrations publiques (50%), à remplir et transmettre des formulaires officiels comme Tax-on-Web par exemple (45%) ou télécharger et imprimer des formulaires administratifs officiels. Les autres démarches sont moins courantes: communiquer par mail avec l’administration concerne moins de quatre internautes sur 10 (31%).
Pour du loisir
Dernier fait saillant de l’étude: les internautes issus de classes plus populaires tendent à limiter leur utilisation d’internet aux activités de communication interpersonnelle et aux loisirs. Aussi ils exploitent peu les services numériques pour gérer leurs démarches administratives, lesquelles imposent des manipulations informatiques souvent plus complexes et une bonne maîtrise de l’écrit.
Le caractère officiel des démarches administratives renforce aussi leur peur de se tromper en raison des conséquences potentiellement irréversibles de cette erreur sur le plan de l’accès à leurs droits.